Sciatique bilatérale

Une après-midi, à l’association, la jeune femme africaine venue effectuer un stage de formation, m’intercepte entre deux portes, sentant ma disponibilité, bien qu’elle soit de très courte durée, pour me demander l’interprétation d’un test d’écoute. Lorsque ce fut fini, elle me demanda si son mari pouvait me rencontrer rapidement. Aussitôt dit, aussitôt fait, un rendez-vous juste décommandé réservé le lendemain pour son mari. Dès dix heures le matin, le couple était là, notre jeune femme élancée, accompagnée de son colosse.

À l’ombre du baobab

- À la naissance je faisais déjà 5 kilos, le troisième d’une famille de huit, au Zaïre. Oui, mes parents s’entendaient bien. Évidemment papa était nerveux et battait parfois maman, mais malgré tout, ils ont continué la route ensemble. Jamais malade, je suis venu me former en France en 1984 plusieurs fois. J’ai un BTS d’électronicien, puis les évènements au Zaïre m’ont contraint au statut de réfugié politique, et je suis resté en France en 1987, avec ma femme et mes filles. J’ai eu deux autres petites filles depuis.

- Vous avez la quarantaine, jamais d’ennuis spécifiques dans le passé, alors qu’est-ce qui vous amène là ?

- Je suis fatigué, démoralisé, j’étouffe et j’ai une angine. J’ai un bon niveau avec mon diplôme et lorsque j’ai recherché du travail grâce à ce bagage, les employeurs considéraient ma demande, mais ne me prenaient jamais. Ils se fiaient à la race. À la longue, j’ai décidé de me rabattre sur des travaux d’ouvrier, et là, j’ai été tout de suite embauché à Saint-Nazaire.

Vous comprenez comme je suis noir, un noir ne peut pas être à un poste de responsabilité, par contre comme ouvrier, pas de problème ! Pour mon travail en tant qu’ouvrier à Saint-Nazaire, c’était extrêmement fatiguant. Pourtant, je suis costaud, mais chaque soir j’étais éreinté. Alors, au bout de quelques mois, j’ai décidé d’arrêter et je me suis mis en quête d’un emploi plus en rapport avec ma qualification.

J’ai bien sûr essuyé des refus partout où cela correspondait à ma formation, mais finalement, après quelques mois, j’ai trouvé un petit emploi, dans une petite entreprise, et là c’était définitif. J’y suis allé deux jours et, curieusement, le troisième jour, j’ai été pris de malaises, je ne pouvais plus rien faire. Je suis revenu chez moi très fatigué, presque paralysé, sans raison apparente. Je n’avais pas forcé et, de plus, je pensais jouer de malchance. Un endroit où l’on m’embauche directement et définitivement, une petite entreprise où on avait besoin de moi, tomber malade ainsi au bout de deux jours. C’était vraiment inexplicable, à se taper la tête contre les murs. Je suis allé voir le médecin qui a diagnostiqué une sciatique bilatérale, m’a conseillé deux jours de repos et m’a affirmé qu’il n’y aurait plus de problème.

J’ai effectué un scanner sur lequel on ne voyait rien, mais au bout de deux jours, je n’allais pas mieux du tout, au contraire. Paralysé, sans force, des douleurs et la déception de ne pouvoir retourner travailler rapidement. C’était une entreprise fragile, elle ne pouvait assumer un fardeau comme moi. Alors je viens aujourd’hui vous demander la raison de ce mal étrange, bien que tout à fait réel, car je suppose que tant que l’origine n’en sera pas éclaircie, cela risque de recommencer.

- Je ne sais comment procédaient vos ancêtres à l’ombre du baobab, mais j’imagine qu’ils n’auraient pas renié cette méthode. Racontez-moi le rêve qui vous vient à l’esprit.

- Eh bien, justement, cette nuit j’étais avec un animateur de télé, Georges Beller, et il me conseillait d’aller dans une école dans laquelle il m’accompagnait, et souhaitait que je rentre dans la première classe. Je refuse et vais dans la suivante. Là, quelle n’est pas ma stupeur, de la voir inondée donc inaccessible.

Je reviens vers Georges en lui disant : “Tu as raison, elle est inondée. Je vais dans la tienne.” J’y entre derechef et m’aperçois alors qu’elle aussi est inondée.

Ce rêve s’arrête là.

- Aimez-vous Georges Beller ?

- Oui, il m’est très sympathique, j’écoute toutes ses émissions.

- De quel genre d’école s’agissait-il ?

- En y réfléchissant mieux, cela ressemblait à une école au Zaïre où l’on apprend à laver le linge.

- Connaissez-vous l’expression c’est du beau linge ? 

- Non, pourquoi ?

- Cela signifie des gens hauts placés mais pas nécessairement de grande qualité humaine. Un balayeur peut valoir un président de la République ou réciproquement.

Le rêve signifie que vous devez aller à l’école de vous-même, de votre intériorité. Vous possédez un diplôme, un savoir, mais vous ne vous connaissez pas et ne connaissez pas l’âme humaine. Vous vous trompez sur les gens car vous les jugez selon l’apparence. Vous vous fiez à leur bel air, leurs belles paroles, et vous vous faites gruger à chaque fois. De plus, vous êtes très émotif et chaque échec vous amène des perturbations émotionnelles en discordance avec les faits. Petit, n’aviez-vous pas des problèmes avec l’eau ? 

- Oui, j’avais peur de l’eau, et jusqu’à l’âge de 5 ans je ne voulais pas me laver. C’est bien sûr différent maintenant.

- C’est différent en ce qui concerne l’eau de la réalité dont vous n’avez plus aucune crainte, mais l’eau au sens symbolique, en particulier son côté émotionnel vous pose toujours des problèmes. Reprenons l’image du linge à laver. Vous devez au préalable le tremper, vous tremper, vous mouiller dans certaines situations, ensuite on savonne, on prend des savons, des claques, des expériences douloureuses, pénibles, on frotte, on retrempe, on se frotte aux réalités, on doit éliminer soi-même le savon, les peaux de banane, puis il faut rincer, éliminer l’eau, l’excès émotionnel, se noyer dans une goutte d’eau dit-on, puis sécher, accéder à un stade spirituel plein de soleil où toutes les expériences vécues auront été notre connaissance et notre richesse et donneront toute sa valeur au linge. Actuellement, vous avez effectué le stade du savonnage, du frottage, mais vous êtes encore plein d’eau. Vous devez éliminer et sécher. Concrètement, votre sciatique bilatérale est due au fait que vous vous êtes senti abaissé d’avoir à effectuer des tâches pas à la hauteur de votre niveau, car vous êtes trop absorbé par l’équivalence :

“Je suis ce que je fais”, totalement erronée mais due à un complexe de votre part.

Abaissez votre niveau, c’est-à-dire acceptez un travail qui n’est pas en rapport, pour l’instant, avec votre qualification mais où vous aurez la possibilité de grimper les échelons et de montrer votre valeur réelle.

Christine HERZOG

Article paru dans Votre Témoignage Santé N°4 – Déc. 2003

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