Un eczéma récidivant

Un être humain a la possibilité de survivre plus d’un mois sans s’alimenter. Privé de sommeil, il ne tient pas plus de quinze jours. Que cache de si important cette fonction ? La détente et le repos sont indispensables, mais l’essentiel est de rêver. Si l’on supprime le rêve à quelqu’un en perturbant les phases du sommeil paradoxal, où cette activité se déroule, il subira des troubles psychiques. On sous-estime quelquefois l’extrême importance des rêves dans la construction de la personnalité et la maîtrise des événements. Les rêves ont un sens. II faut savoir les décrypter. C’est certainement le meilleur moyen de communiquer avec soi-même pour mieux comprendre, ensuite, les autres et l’univers qui nous entoure. Ce cheminement est indispensable mais long, et demande un effort réel. Pour vous y aider, nous ouvrons nos colonnes à une nouvelle rubrique. Le but est de faire réfléchir, de faire prendre conscience, d’ouvrir des portes, hélas, trop blindées.

Esméralda, une jeune femme espagnole, mariée depuis peu et mère d’un garçon de quelques mois, était venue me consulter selon l’avis d’une amie de même nationalité. Elle était venue travailler en France, sur les conseils de sa soeur, à l’âge de dix-sept ans. Elle devait aider des amis à ouvrir un hôtel-restaurant. Ils lui avaient promis un bon salaire. En fait, elle était entrée en esclavage…

Elle ne supportait pas l’absence de respect et de considération alors qu’elle faisait son travail de son mieux. Une autre jeune fille récemment embauchée avait droit à plus d’égards qu’elle qui avait assumé tous les durs travaux et toutes les responsabilités durant dix ans, sans avoir droit au moindre remerciement.

Les employeurs avaient placé cette jeune personne à un poste plus important qu’elle, alors qu’elles effectuaient strictement le même travail. Aussi elle était constamment de mauvaise humeur, car elle avait donné le meilleur d’elle-même sans être reconnue. Son fils âgé de quelque mois était confié à une nourrice : il manifestait une allergie récidivante, un eczéma localisé tout autour du cou.

Malgré de nombreuses consultations auprès de différents spécialistes, médecins, magnétiseurs, aucun traitement ne réussissait. Cela l’inquiétait d’autant que son fils pleurait beaucoup. Elle désirait avoir mon avis.

Je lui répondis que, puisque la médecine officielle n’était pas efficace, il fallait rechercher une autre cause: par exemple, la nourrice n’était-elle pas une femme extrêmement possessive ? Elle avait très probablement connu de gros problèmes avec ses propres enfants. Esméralda répondit qu’effectivement la nourrice était extrêmement possessive. L’enfant ne pouvait dormir chez elle tant il pleurait quand il s’y trouvait. Elle n’avait pu elle-même concevoir ni enfanter et cela avait été le drame de sa vie. C’était une femme “très mal dans sa peau”. Esméralda n’osait pas lui enlever son enfant, car elle le lui avait confié dès son plus jeune âge, mais elle ne la sentait pas complètement libérée, loin de là.

J’ignorais si les problèmes venaient seulement de la nourrice, à vrai dire j’en doutais, mais je pensais qu’une nourrice avec de tels problèmes psychiques ne pouvait qu’aggraver ceux de l’enfant.

Le nourrisson pouvait se sentir étranglé à juste titre par cette possessivité. Il ne pouvait pas s’exprimer par la parole ni par le dessin, aussi la seule expression qui lui restait était le langage du corps. Je conseillais donc à la maman de changer de nourrice, puisqu’il ne semblait pas possible de résoudre à distance les problèmes de cette femme sans sa participation consciente délibérée.

Esméralda acquiesça, bien que cela ne lui fût pas facile à réaliser. Enfin, elle pouvait essayer de présenter la situation de manière à ce que la nourrice ne se sente pas trop atteinte dans son amour-propre ni dans son coeur. Quelque mois plus tard elle revint me consulter, en proie à une “grosse crise”, selon son expression. Elle se disait incapable de supporter plus longtemps son mari et son enfant. Enfin, elle voulait, purement et simplement, supprimer son beau-père, qu’elle supposait être l’auteur de ses problèmes, mais cela est une autre affaire que nous éclaircirons une autre fois.

- Mon fils n’a plus rien au cou. Une semaine après l’entretien, nous avons décidé de trouver une autre nourrice, et nous sommes partis quinze jours en vacances en Espagne. Tout l’eczéma a disparu en un clin d’Å“il. À notre retour, il est encore resté deux mois chez la même nourrice, le temps d’en trouver une autre, mais rien n’a réapparu. Je suis très satisfaite de la nouvelle. Elle est moins maniaque, plus douce et plus gentille que la précédente.

Je lui fis remarquer :

- L’eczéma a disparu du jour où vous avez pris la décision de changer sa nourrice. II était alors libéré. C’est pourquoi les signes ne sont pas revenus. Vous n’aviez pas conscience de la négativité de cette personne.

- Absolument, je n’étais pas sûre et, curieusement, en rentrant de vacances, j’ai observé de façon plus attentive son comportement, comme vous l’aviez suggéré. J’ai constaté qu’elle le gavait “à mort”.

Je le lui laissais à 7 h 30 le matin jusqu’à 18 h 30, heure où je venais le reprendre. Elle disait: « Mais pourquoi venez-vous le chercher si tôt! Allez donc faire vos courses. Prenez du bon temps votre mari et vous. » Alors que nous ne l’avions pas vu de toute la journée et que ce rythme durait six jours sur sept, toute la semaine sauf le dimanche.

- Plusieurs fois lorsque je suis arrivée, le bébé vomissait. Sous mes yeux, elle le faisait manger, manger… Il n’en pouvait plus. Cela en était trop. Le plus curieux, c’est qu’avant je ne m’étais rendu compte de rien.

Et moi de lui répondre :

- Les faits obligent à ouvrir les yeux !

Christine HERZOG

Article paru dans Vous et Votre Santé n°5 – 1993

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