La bimbo et la burqa

Shaïma, algérienne et bimbo à la BB raconte : « La scène se passe dans une grande surface. J’avais très mal aux gencives et comme je suis un peu bigleuse, j’avais la tête dans les produits pour trouver celui qui me soulagerait de ce foutu mal. J’étais en jean, pas trop maquillée et j’entends “femme de Satan”.

Je me retourne et vois deux mecs qui continuent leur chemin en ayant sorti cette invective. Pourquoi ?

Un coup d’œil dans l’allée, j’y suis seule, c’est donc pour moi. Le mal de dent aidant, la moutarde me monte au nez avec l’envie de moucher les morveux. Je cours vers eux et les interpelle en arabe :

− C’est de moi que vous parlez ? Qu’est-ce que vous faites dans ce pays de Satan ? De quel droit vous osez dire cela ? Qu’attendez-vous pour rentrer dans votre pays divin ?

Mais vous êtes maquillée. Vous arrive-t-il de prier ? (Là, mon sang n’a fait qu’un tour.)

− Que vous soyez croyants, je respecte, mais la croyance c’est la tolérance. Tu ne me connais pas et j’ai beaucoup de respect pour toutes les religions. Dieu nous a tous créés.

− On est surpris. Vous parlez en arabe. (Ils m’ont prise pour une Française.)

− Ah ah, je ne suis pas moins bien que vous parce que je suis ma religion à ma façon. Je ne suis pas plus mécréante parce que je m’habille en jean ou parce que je vis à l’occidentale. Cela ne regarde que moi, et vous n’avez rien à y redire, espèces de petits intégristes. J’ai des fils et franchement j’aurais vraiment honte s’ils se comportaient ainsi.

− Excusez-nous, on n’avait pas compris. Vous êtes Arabe.

− Non, non, il n’ y a aucune excuse à ce que vous dites. Arabe ou non, cela ne change rien. Et je peux vous dire une chose : lorsque j’irai au paradis, vous serez loin derrière moi. La meilleure religion c’est d’abord le respect des autres.

Et elle s’en va la tête haute, comme elle en a l’habitude. Ses quatre fils costauds, lui disent :

− Mais maman, tu n’as pas eu peur qu’ils te foutent sur la gueule ?

− Oh non, de quoi j’aurai peur ? »

Eh bien faut-il avoir peur de la burqa désormais ?

La burqa est donc ce voile noir qui recouvre la quasi-totalité du corps pour laisser juste apparaître un petit rectangle sur les yeux, un petit espace quadrillé comme un judas.

Personnellement, en tant que femme cette vêture me paraît proprement inadmissible.

Car une femme est faite pour être vue, une femme est conçue pour être déshabillée d’abord du regard.

La femme doit déshabiller l’homme comme l’homme doit déshabiller la femme. Chacun doit pouvoir jauger l’autre.

La femme sera d’autant plus libre qu’elle pourra exercer son libre choix. Si l’esclavagisme convient à certain(e) s, il n’est pas bénéfique pour l’être humain.

Aïcha est interpellée par deux indignes simplement parce que ses formes sont mises en valeur par sa toilette.

On observe que les porteuses de niqab sont souvent des françaises converties − voire des femmes diplômées et militantes − qui n’ont pas subi le régime des talibans.

Sous leur joug, des femmes ont été fouettées pour avoir rejeté la burqa, d’autres lapidées en cas d’adultère.

Pour avoir osé parler à un garçon, une jeune fille de 16 ans a été enterrée vivante, récemment, en Anatolie.

Si l’usage est de ne pas porter une burqa dans un pays − et le régime de laïcité en France suppose l’abstention du voile intégral dans l’espace de l’autorité publique − il est fondamental de pouvoir respecter l’usage d’une liberté.

On soutient que la burqa est la revendication d’une identité, d’une liberté – et j’ajouterai même d’une toute-puissance : voir sans être vue – jusqu’au jour où les porteuses de voile intégral, victimes de l’esclavage volontaire, s’en mordent les doigts mais ne peuvent plus tendre la main, cadenassées dans leur prison.

Rattacher la burqa ou le niqab à un simple masque c’est masquer l’enjeu essentiel de ce port et se voiler la face quant à la volonté de nihilisation qui se cache derrière.

L’habit fait « rentrer dans les ordres », rend soumis(e). Le strip-tease intégral – la nudité – est interdit dans la rue.

Vouloir « tout cacher » est le revers du « tout montrer ».

Dans les deux cas, l’être est dépouillé de ses couleurs, de sa singularité. Une forme de désintégration vestimentaire avant l’éradication d’une pensée personnelle, d’une personne.

Jamais le Coran n’a imposé le port du niqab ou de la burqa. Dans le désert les femmes se voilaient pour se protéger des vents de sable et ne pas être asphyxiées par ces grains s’agglutinant dans les yeux, les oreilles, la bouche. Les hommes se voilaient aussi – pour les mêmes raisons.

Si on n’impose pas un non port, le port sera imposé.

Il s’en suivra une lutte sans merci entre intégrismes qui se développent tant sur le mode islamique que sur le mode chrétien, évangélique, judaïque, hindouiste, bouddhique … Les uns renforçant les autres, bien naturellement.

Il est plus aisé d’être esclave et de servir un maître, un dogme que d’être maître (sse) de soi-même !

L’intégrisme n’est pas à notre porte, il n’est pas sur le seuil de notre porte, il est dans notre demeure. Le sectarisme est dans nos têtes, dans nos corps, dans nos pouvoirs.

Il est la lèpre la plus rongeuse qui soit. Il relève de l’intégrité de refuser l’intégralité d’un voile désintégrant pour les individus quel que soit leur sexe.

J’ai de très bonnes amies musulmanes – pratiquantes ou non – et mon article se veut une offrande à la Femme, un mini plaidoyer contre le port désertifiant de la burqa. En public, pas plus de strip-tease intégral que de voile intégral !

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