Comment décrypter nos rêves
Par Christine | Catégorie 2-Oniriques : exploration des rêves
La maladie est une rupture de la relation avec soi-même, les autres et l’Inconnu
Depuis la nuit des temps chaque civilisation, chaque peuple, chaque être a tenté de les appréhender et de les comprendre, à sa façon particulière, inédite. II suffit de lire les innombrables traités et clefs des songes qui leur ont été consacrés depuis des millénaires pour s’en convaincre. Utiliser les rêves peut nous permettre de progresser dans la résolution de nombreux problèmes, notamment de santé.
Encore faut-il savoir comment s’y prendre. Nous avons demandé à Christine Herzog de nous aider à traduire nos rêves en toute lucidité.
À son époque, Hippocrate y voyait un signal clinique, un message adressé au médecin par le corps malade.
Dans l’Antiquité, il existait déjà un enseignement de l’interprétation des rêves qui permettait de déchiffrer, d’écouter ces messages. II a disparu, discrédité par Aristote, puis interdit par l’Église catholique.
Que sont les rêves ? À quoi servent-ils ?
Ce sont des matériaux nécessaires à la vie, émis pour les besoins primordiaux de chaque individu. Ce sont donc des signatures de chacun, dans l’instant d’émission. II est strictement impossible d’édicter des lois, de donner une recette ou de stimuler une démarche concernant le domaine onirique. Tout ce que l’on peut dire est qu’ils sont essentiels à la vie et à la construction de l’être.
Trouver la clé pour sortir du labyrinthe
Le Pr Jouvet neurobiologiste lyonnais, l’a très bien exprimé dans un récent article du Nouvel Observateur : “Le rêve sert non seulement à l’entretien de la machine mais à préparer la journée du lendemain.”
En effet, durant le sommeil profond, l’homme se prépare à réagréger, à regrillager sa structure génétique et atomique. II se met donc dans la disposition de lui-même.
J’ouvre au hasard la Clef des songes, un ouvrage magistral d’Artémidore[1] d’Éphèse. Cette clef des songes date du deuxième siècle. Artémidore, très connu en son temps, avait voyagé, recherché, compulsé, critiqué selon l’usage en cours ses devanciers, et rédigé cette clef des songes.
Pages 148 et 149, la lune signifie “la femme du songeur et sa mère, mais aussi sa fille et sa soeur, car elle passe pour nourricière, la navigation, car c’est d’après elle que les pilotes se dirigent en mer, un voyage, car elle est en mouvement, les yeux du songeur, car elle est cause du fait de voir, et des maîtres féminins, car les déesses ont rapport avec les maîtres féminins. C’est aussi le reflet du soleil”.
Sur le thème de la lune on trouve encore une dizaine d’interprétations supplémentaires suivant qu’on aperçoit le visage du rêveur ou de la rêveuse et à quel endroit. On voit donc, déjà à cette époque, des interprétations sélectives selon le sexe, selon le métier, selon la physiologie du sujet. On ne retrouve pas toujours autant de nuances dans les clefs des songes actuelles, loin de là .
L’art de décrire un rêve est donc d’abord l’art de comprendre la personne elle-même, puis d’essayer de “s’inhiber”, de s’imbiber de l’ensemble de ses désirs. À travers cette osmose, il faut tenter de comprendre le déroulement du labyrinthe personnel du consultant pour approcher la lecture à des niveaux différents. En effet, nous pouvons considérer qu’il y a un certain nombre de niveaux et que nous pouvons les classer en deux catégories particulières : les rêves “prémonitoires” et les rêves “non prémonitoires”.
Les rêves prémonitoires
II y aura une prémonition, non pas de l’avenir mais des événements qui sont en cours de réalisation et dont la racine est prise dans les instants passés. C’est cela un rêve prémonitoire. Ce n’est pas un rêve du futur. En effet, le futur n’est pas lisible par nous, il l’est seulement par Yahvé ou Allah ou Dieu le Père, selon les croyances de chacun. Chaque individu, à tout instant, a la liberté de son choix.
Je recevais une petite fille de treize ans qui portait les problèmes parentaux malgré son jeune âge. Je la connaissais donc depuis quelque temps, lorsque son père se pendit. Elle était juste rentrée de l’école et elle avait donc entendu tomber le tabouret sur lequel il était monté. Un bruit qu’elle ne serait pas prête d’oublier ! Je la reçus quelques jours après le drame. Plusieurs mois auparavant, elle avait effectué le rêve de la pendaison de son père et elle me demanda ce que j’en pensais. Je lui répondis que son rêve lui dessinait, en quelque sorte, une tendance qu’avait son père, pour la préparer éventuellement à un événement similaire et que cela ne signifiait pas que la pendaison était inéluctable. Le rêve est donc plus souvent un avertissement, ce n’est jamais une prédiction du futur.
Les rêves non prémonitoires
II y a les cauchemars intégrant la structure physiologique et spirituelle de l’individu. Les rêves sont des seings, des signatures, des marques de fabrique. Au travers de ces dernières, on remarque les attitudes, les étapes du rêveur, ses propres maux et l’évolution de ses maux.
Il est vrai que nous sommes tellement habitués à nos rêves que nul n’y prête attention ! Eh bien, conventionnellement, nous avons la possibilité, l’usage de
pouvoir “sentir” et “ressentir” les ébauches et les attitudes du sujet dans sa manière d’être. Vos rêves vous ressemblent, et vous ressemblez à vos rêves !
Surtout ne vous épuisez pas à porter un jugement qui engendre le plus souvent des erreurs qui pourraient être malencontreuses. Par contre, à travers eux, on peut repérer les mal-être, ou les maladresses des sujets. Les rêves sont donc comme des seings qui nous donnent certaines couvertures, certains renseignements. Ils apportent donc une définition de notre personnalité, de nos tendances, de nos travers et de nos goûts, comme notre écriture, nos signatures.
L’aide du thérapeute est primordiale
Ceux qui travaillent beaucoup rêvent très peu. Et l’image d’un père sur occupé, qu’il soit virtuose du piano ou d’une technique, peut engendrer, à la première ou à la deuxième génération, un refus de travail sous forme de dilettantisme voire de marginalisation.
J’ai en souvenir l’histoire d’un PDG de forte stature qui partait pour toutes les croisades, récriminant souvent contre les excès de la religion et les religieux qu’il côtoyait dans sa famille. Âgé d’une soixantaine d’années, c’était un homme équilibré, généreux. Il était lui-même très maternant, donnant le sein à droite et à gauche. II avait eu, à l’époque où je le recevais, un rêve choc : “La fête aux serpents. Je prépare une fête avec ma famille et mes amis. Je prépare à boire en versant de l’eau de rosée dans un aquarium en verre où tout le monde pourra se servir. L’aquarium est presque plein. J’aperçois alors qu’il y a deux serpents au fond : un jaune et un noir. Je pense que ce n’est pas bien grave, et quand je reviens ils se sont multipliés. Encore un peu de temps et les têtes de serpents jaunes grouillent de partout. Il faut absolument que je trouve une faucille pour leur couper la tête au fur et à mesure qu’elles sortent de l’aquarium. Je me réveille l’angoisse à la gorge.”
Le rêve évoque clairement ce fait qu’il abreuve nombre de gens autour de lui (l’enfer est pavé de bonnes intentions). Ses pensées apparemment positives, lumineuses, deviennent très piquantes et le rêve l’avertit d’une somatisation possible (le serpent est le symbole du caducée).
Elles finissent effectivement par engendrer un goitre. Il a donné autour de lui sans compter. Certains de ses enfants en ont profité et il n’a pas su discerner celui qui savait travailler des autres. Faute d’avoir écouté les conseils de son rêve, l’entreprise est donc allée à “vau-l’eau”. II s’est donc trouvé étouffé financièrement, psychologiquement, puis physiquement par son goitre plongeant dans le médiastin.
Ces marques indélébiles tournent dans l’esprit et sont tournées, retournées pour finir totalement détournées de leur véritable sens.
Chacun les traduit en cauchemars ou en fantasmes. La primarité amène la précarité et enferme totalement dans un labyrinthe dont on ne peut plus sortir, car alors ces impressions plus ou moins cachées s’enferment pour détruire la seule chance qui permettrait de faire revivre et de vivifier la vie.
Le thérapeute, le psychanalyste, est là pour tirer les sonnettes d’alarme ou le tocsin si vous préférez, afin d’activer la résonance du sujet avec lui-même. Ainsi on peut voir que ses images cauchemardesques ou fantasmatiques croissent sans crainte d’être déstabilisées. Par conséquent, elles induisent une évolution sectaire qui ne peut conduire qu’à vivre des avatars. II faut avoir la connaissance du coeur pour pouvoir faire comprendre que l’homme a non seulement deux jambes et deux bras mais qu’il doit pouvoir harmoniser sa pensée et son coeur, son passé et son présent. De la sorte, il peut être en mesure d’effacer définitivement des emprunts et des empreintes mal comprises, afin de cheminer vers son devenir.
Le rêve peut vous blesser, il peut être le guérisseur ou le médecin
Vos rêves, les rêves, sont des sécrétions mentales, tant du conscient que du subconscient, nécessaires à l’épanouissement de l’homme même si ils sont cauchemardesques. Ils permettent d’évacuer certaines pulsions, certaines tensions, certaines agressions et de les transformer soit par bribes en un fantasme exagéré soit en un contrôle intelligent de soi-même.
Les rêves doivent vous permettre de vous réaliser
II m’est arrivé dans des cas très difficiles, étant dans une impasse, que des rêves me donnent une solution. Pour déterminer, par exemple, l’origine d’un autisme afin de pouvoir le prendre en charge. Mais n’imaginez surtout pas que le rêve va vous donner une information sur votre voisin, votre compagne ou votre famille. Si d’aventure il arrivait que le rêve donne un éclairage apparent sur lui, ce ne sera pas son état qui sera donné mais l’état de l’échange que vous allez faire avec lui et qui sera une résonance.
Le rêve ne va vous donner l’information que sur votre être intérieur ou sur l’extérieur de vous-même, ni plus ni moins.
Le rêve a été source d’inspiration pour nombre de créateurs ou de scientifiques
Lorsque Haendel composa son Messie, il fut un jour à court d’inspiration. En rêve, il entendit le choeur final de son Oratorio si clairement qu’il n’eut qu’à le transcrire au réveil.
Niels Bohr, le grand savant connu pour la théorie qui porte son nom et traite des activités de l’atome, eut un rêve étrange alors qu’il était étudiant. II cherchait depuis longtemps la solution d’un problème, il s’endormit et se vit transporté sur le soleil de gaz brûlant, d’où il pouvait observer la terre. Des planètes passaient en sifflant devant le soleil. Elles étaient reliées à celui-ci par de minces filaments et tournaient tout autour. Soudain, le gaz sur lequel il croyait être se solidifia et le soleil et les planètes se réduisirent. Les planètes tournaient autour du soleil à une vitesse effrénée. Niels Bohr se réveilla à ce moment et eut conscience d’avoir découvert en rêve le modèle de l’atome tant cherché. Le “soleil” était le point fixe autour duquel les électrons tournoyaient à une vitesse prodigieuse. C’est ainsi que ce savant célèbre décrivit sa découverte dans son traité.
La vie est un rêve sans sommeil.